La paix des dupes

1. En France

À l’issue de la Première Guerre mondiale, la France connut un bref et léger sursaut vers la « droite » lors des élections législatives de 1919. Ces élections permirent de voir, pour la première fois depuis 1876, à l’Assemblée, 279 députés de droite sur 613 au total.

Cet effort très nouveau, dans la population française, provenait de la grande déception causée d’une part, par l’attitude et les résultats extrêmement négatifs de certains généraux durant cette guerre, et surtout depuis 1914, par les nombreux scandales politico-financiers au plus haut niveau de l’État. 

La gauche « radicale » et bourgeoise au pouvoir avant et durant la guerre, avait failli par son impéritie et sa totale incompétence. Le nouveau « bloc de droite » à l’assemblée espérait infléchir la situation, malheureusement en vain, du fait de la trop grande efficacité des nombreux et vieux briscards de la politique de gauche, habitués à faire valoir l’entre-soi.

Le « bloc de droite » appelé parfois « bloc national », divisé et manquant d’expérience, fut facilement évincé après les élections législatives de 1924, par une coalition des gauches appelée « cartel des gauches ».

La gauche « radicale » et bourgeoise, effrayée par l’émergence, à l’Assemblée, de 279 députés de droite, fut contrainte de négocier pour la première fois avec la gauche « socialiste » et même avec la nouvelle gauche « communiste » pour faire « barrage » à la droite naissante dans la population. Cette méthode sera plusieurs fois renouvelée au 20e puis au 21e siècle.

La nouvelle situation, suite à ce « cartel des gauches », fut pire qu’avant 1919 en apportant son lot de responsables politiques, au gouvernement et dans les Assemblées, les plus incompétents de toute la IIIe République. En effet, la gauche « radicale » dut partager le pouvoir avec la gauche « socialiste », révolutionnaire et, malheureusement, totalement novice.

Ce danger de voir l’électorat de droite s’étoffer dans l’opinion publique avait contraint les « gauches » de ce cartel à s’entendre sur une politique anti-droite. Ce fut, par exemple, l’occasion d’aller à l’opposer de l’Église traditionaliste qui parle « d’esprit de vérité » et ainsi discréditer ceux qui ne partagent pas leur opinion. La gauche, profondément anticléricale, va inventer « l’esprit de déni ».

Telle une secte, le « cartel des gauches » va, pour les siècles suivants, convaincre ses « disciples » que ce qu’ils voient, malgré l’évidence, n’est pas la vérité ; « Vous ne voyez pas ce que vos yeux voient ». Ainsi, elle pourra sans complexe, durant tout le 20e puis le 21e siècle, proclamer que ce que voient leurs concurrents, en l’occurrence les citoyens de droite, ne correspond pas à la réalité, du moins celle que doivent voir tous les membres de gauche.

Cette vraie fausse vérité devra être imposée à tous par la bien-pensance de gauche en utilisant tous les moyens de communication tels que les journaux, les livres, la radio, la télévision et les différents médias inféodés.

Édouard Herriot fut nommé le 14 juin 1924, premier président du Conseil de ce « cartel des gauches ». Celui-ci, né à Troyes le 5 juillet 1872, avait fait des études littéraires. Après son BAC et une année de « khâgne » (nom usuel péjoratif donné au 19e siècle, à la première année de prépa, réalisée par les étudiants de la branche littéraire), il fut très actif dans le milieu anarchiste avant d’obtenir son premier poste ministériel le 12 décembre 1916. Bien que membre du parti « radical » il se rapprochera du milieu bolchévique après son voyage en U.R.S.S en 1922.

Comme tous les membres de la gauche « radicale » et bourgeoise, Édouard Herriot était un anticlérical viscéral. Dès sa prise de fonction en tant que président du Conseil, celui-ci supprima le poste d’ambassadeur auprès du Saint-Siège à Rome. De plus, il annonça l’expulsion de plusieurs milliers de congréganistes, pourtant venus se battre sur le front en France, et enfin, il défendit la mise en application de la loi de 1905, dans les départements de la Moselle et d’Alsace.

Dans la lignée du socialiste Aristide Briand revenu aux Affaires étrangères en 1925, Édouard Herriot, pacifiste convaincu, va inaugurer dès 1924, côté français, la politique « des dupes » avec les Britanniques et les Allemands.

En dissimulant aux yeux de tous la réalité de la situation économique de la France, il simulera, faute d’être capable de faire mieux, l’allégeance de la politique étrangère française à celle des Britanniques.

L’économie de la France était, en 1924, en péril de mort. Au plus haut niveau de l’État, on le savait depuis 1922, mais il fallait garder secrète cette situation faute de concrétiser une crise financière sans précédent. Le président de la République Raymond Poincaré avait pourtant brillamment réussi à minimiser la crise financière jusqu’en 1920.

Le « cartel des gauches » qui comptait en vain sur les « réparations de guerre » fut incapable de rembourser les prêts et les avances de la Banque de France, réduisant à néant les efforts de Poincaré, de ce fait, allant jusqu’à la limite de l’explosion et de la banqueroute avec un déficit « secret » de 41 milliards de Francs.

Les gouvernements français depuis 1919, concernant les « réparations », furent continuellement dupés par les Allemands mais aussi par les Britanniques et les Américains. Les Allemands ne payèrent quasiment rien, et ce avec l’aide sournoise des gouvernements britanniques et américains. L’Allemagne était devenue le client principal de ces pays depuis 1920.

Christian Delporte précise, dans son livre sur « La IIIe République » de 1998 ; « Cet argent qui manque, elle le cherchera dans de nouveaux impôts violents et tyranniques, confiscation de capitaux, de propriété, d’héritages, de bénéfices industriels et commerciaux ».

Concernant la situation avec la Banque de France, Christian Delporte révèle la directive du ministre des Finances ; « Clémentel persuade alors le gouverneur de la Banque de France, Robineau, de truquer purement et simplement les bilans hebdomadaires qu’approuve le Conseil de Régence ».

Toujours d’après Christian Delporte, le gouverneur de la Banque de France, Georges Robineau lui aurait répondu le 17 juillet : « Le péril de l’inflation, sous quelque forme insidieuse qu’il puisse être présenté, est une menace de mort qu’il faut écarter à tout prix ».

La situation en France était catastrophique car les caisses de l’État étaient vides et les différents gouvernements, incapables de trouver une solution fiable à ce problème, subissaient les rappels incessants, de remboursements des différents créanciers, mais aussi des énormes besoins financiers urgents pour la reconstruction des industries et des infrastructures.

Cette grave crise va faire tomber, en avril 1925, le premier gouvernement du « cartel des gauches » et introduire à la tête de l’État plusieurs gouvernements « socialistes » dirigés par Paul Painlevé puis par Aristide Briand. Ces derniers, loin d’apporter des solutions, amplifièrent la crise financière entraînant de fait une véritable crise de régime.

 

2. En Allemagne et au Royaume-Uni

La situation économique et sociale en Allemagne et au Royaume-Uni, semblable à celle de la France, devait, elle aussi, ne pas être dévoilée, faute d’entraîner ces pays dans une crise sans précédent.

 

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Pour lire la suite, voir le chapitre « La crise de 1929 « …