L’aventure Mexicaine
1. Contexte au Mexique avant 1860
1.1 De la « Nouvelle-Espagne » à la République mexicaine
En 1800, le Mexique n’existait pas encore. Depuis plus de trois siècles, la colonie espagnole appelée « Nouvelle-Espagne » comprenait les territoires de l’Amérique centrale, jusqu’au nord de la Californie et à l’est le Texas. L’ensemble dépendait d’un vice-roi, représentant localement la couronne d’Espagne.
Cette importante zone géographique, six fois plus grande que l’Espagne, était divisée en zones économiques gérées par des représentants de la couronne espagnole, mais sous la tutelle du vice-roi.
La population était composée essentiellement d’Espagnols nés en Espagne, de Criollos (Espagnols nés au Mexique), de métis (Espagnols nés au Mexique mais mariés avec des Autochtones ou des Indiens) et enfin d’Indiens (Autochtones descendants d’Amérindiens).
Au fil des années, s’est instauré un système de castes, basé sur les origines « espagnoles » de cette population estimée en 1803, à 5 837 000 personnes. La caste dirigeante sur l’ensemble de la colonie, était composée essentiellement d’Espagnols nés en Espagne ou d’Espagnols nés au Mexique.
Ces derniers, envieux des privilèges des précédents, étaient de plus en plus souvent en désaccord avec l’Espagne et cherchaient à s’émanciper de leur tutelle européenne.
L’activité économique principale de cette colonie concernait la production d’or et d’argent. La plus grande partie de ces minerais était expédiée en Espagne.
La gestion politique de la « Nouvelle-Espagne » dépendait de celle de l’Espagne. Or, à partir de 1807, la couronne d’Espagne était entrée dans un conflit de succession entre le roi Charles IV et son fils, Ferdinand VII. Napoléon 1er, appelé par la couronne d’Espagne pour résoudre ce conflit, finira par faire abdiquer le roi en place, au profit de son frère, Joseph Bonaparte.
Ce dernier, devenu roi d’Espagne, va déclencher en Espagne, mais aussi dans les colonies espagnoles, de violentes révoltes.
Cette crise politique s’est ajoutée à d’autres conflits concernant des réformes dans la colonie, en vue de la rendre plus rentable pour l’Espagne. Comme on dit souvent « loin des yeux, loin du cœur ».
Des responsables locaux, loin de l’Espagne, avaient fini par favoriser des détournements de production d’or et d’argent, au profit de certaines corporations locales et donc au détriment de la couronne.
En Californie et au Texas, le vice-roi avait déjà fait intervenir l’armée pour contenir diverses rébellions et même des tentatives d’incursion des États-Unis. L’Espagne, sous l’influence du pape, décida dès 1767 d’expulser tous les jésuites de ses territoires, y compris dans la colonie « Nouvelle-Espagne ».
Ces jésuites, d’après la couronne d’Espagne, auraient été à l’origine de certaines rébellions.
Depuis l’invasion de l’Espagne par les armées de Napoléon en 1808, un vent de Révolution souffla sur la colonie espagnole. Certains souhaitaient maintenir le pouvoir « royal » jusqu’au retour potentiel de Ferdinand VII sur le trône, alors que d’autres réclamaient la mise en place d’une République avec la gestion par les villes et les villages.
Cette guerre d’indépendance vis-à-vis de l’Espagne va durer jusqu’au 28 septembre 1821, date de la déclaration d’indépendance du Mexique par une junte provisoire.
Agustin de Iturbide y Aramburu, général espagnol, né en « Nouvelle-Espagne » à la tête des insurgés, va progressivement battre les armées du vice-roi d’Espagne et s’imposer comme le principal meneur des révoltés.
Il finira par obtenir la création du premier gouvernement mexicain provisoire, en septembre 1821. Il sera nommé, le 21 mai 1822, Empereur constitutionnel de l’Empire mexicain, sous le nom d’Augustin 1er. Cet « Empire » fut renversé en 1823 par une nouvelle guerre civile, pour laisser la place à une République fédérale.
L’arrivée de cette République, par les décrets de 1827 et de 1829, entraîna une forte émigration des Espagnols « royalistes » nés en Espagne et avec eux, une fuite importante de nombreux capitaux. L’économie du pays, ainsi que les productions industrielles et agricoles, chutèrent drastiquement en peu de temps.
L’Espagne, empêtrée dans sa propre révolution, entre mise en place d’une République ou le retour de la royauté, n’avait ni les moyens ni l’envie de traiter le grave problème de la colonie « Nouvelle-Espagne ».
Aussi, les troubles et guerres civiles vont se succéder au Mexique jusqu’en 1848, d’où le surnom de « Révolution permanente » parfois utilisé pour désigner le Mexique de cette époque.
La population de l’ex-colonie espagnole, devenue le Mexique, était restée profondément catholique alors qu’au nord du pays, dans les États confédérés des États-Unis, la population était majoritairement protestante.
Malgré cette République, contrairement à ce qui s’était passé en France, l’Église catholique était restée le plus grand propriétaire foncier.
Hélas, tout cela va changer à partir de 1860. La République mexicaine dupliqua la méthode de la Révolution française, en confisquant les biens de l’Église mexicaine, pour tenter d’assainir en vain la dette de l’État.
La situation du Mexique depuis son indépendance avec l’Espagne avait entraîné des convoitises par des pays voisins, dont les États-Unis. De nombreux Européens, fuyant les guerres ou recherchant un développement économique, s’installèrent au Mexique.
Parmi eux, des Français qui développèrent différents commerces, notamment dans la pâtisserie, mais aussi dans le milieu agricole.
1.2 Instabilité politique et guerre des « Pâtisseries »
Les difficultés économiques du Mexique, devenu indépendant, obligèrent le gouvernement à imposer des « emprunts forcés » sur tous les ressortissants étrangers et plus particulièrement avec les Français qui avaient fait fortune dans le commerce de la pâtisserie.
Les importations diverses nécessaires à la population mexicaine provenaient essentiellement des États-Unis, de l’Angleterre et de la France. Cependant, les États-Unis et l’Angleterre avaient obtenu des contrats de commerce très favorables par le gouvernement mexicain. Les produits français surtaxés défavorisaient les importateurs français.
Les négociations entre le gouvernement mexicain et les Français s’éternisaient sans aboutir à des avancées constructives. Les commerçants français installés au Mexique virent leurs commerces ou entrepôts, souvent pillés ou incendiés par des Mexicains.
Certains Mexicains, proches de l’Espagne, reprochaient aux Français leur intervention militaire en Espagne et au Portugal, pendant le Premier Empire.
En août 1829, cinq Français ont été lapidés dans les rues de Mexico. Le 21 août 1833, ce sont cinq autres Français qui furent assassinés dans les environs d’Atencigo. En 1837, un commerçant français, accusé d’actes de piraterie, fut fusillé par les Mexicains.
Les diplomates français informèrent régulièrement le gouvernement parisien de la situation compliquée que vivaient les Français installés au Mexique. La France, par la voix du baron Deffaudis, réclama, pour réparation, au gouvernement mexicain, une somme de 600 000 pesos.
Aussi, pour influencer ces négociations, le roi des Français, Louis-Philippe 1er, envoya une escadre militaire effectuer un blocus naval du port maritime de Veracruz d’avril 1838 à mars 1839.
Le paiement demandé, ne venant pas, les Français, après avoir détruit les défenses du port de Veracruz, débarquèrent le 4 décembre 1838. Plus de trente navires de commerce ne purent décharger leurs marchandises dans ce port.
Le général Antonio Lopez de Santa Anna, ancien commandant des armées mexicaines, lors du siège du Fort Alamo en 1836, à la tête d’une armée mexicaine, mena le combat, en vain, contre les forces françaises. Blessé, il sera vaincu en mars 1839.
Après une intervention diplomatique du Royaume-Uni, le président du Mexique, Anastasio Bustamante, promit aux Français le paiement des 600 000 pesos exigés. Les forces françaises se retirèrent du Mexique, le 9 mars 1839.
Cette somme ne fut jamais payée, ce qui justifiera en partie l’intervention militaire de la France en 1861.
Le 25 septembre 1839, le roi des Français, Louis-Philippe 1er, envoya un ambassadeur, Alphonse Dubois de Saligny, au Texas. Cette région, située au nord-est du Mexique, venait de faire sécession en créant la République du Texas.
Alphonse Dubois de Saligny va progressivement devenir l’interlocuteur privilégié de Paris concernant toutes les affaires relatives au Mexique.
1.3 Guerre américano-mexicaine
En 1846, les frontières entre le Mexique et les États-Unis n’étaient pas figées officiellement. Le Mexique, qui avait besoin d’élargir son espace économique, étendit ses territoires vers la Haute-Californie.
Ces territoires étaient aussi considérés comme américains par les États confédérés américains. Le Mexique fut déclaré « envahisseur » de territoires américains.
Le Mexique, affaibli militairement et économiquement, fut la proie facile des États-Unis, en vue de récupérer le territoire du Texas, lui-même en cours de révolte pour son indépendance depuis 1836.
Suite au vote du Congrès américain, les troupes mexicaines furent exposées à celles des États-Unis entre 1846 et 1848 au Texas mais aussi en Californie.
Des batailles ont eu lieu dans tout le Mexique. Finalement, lors de la dernière confrontation à Chapultepec, les 12 et 13 septembre 1847, le général Santa Anna et son armée vaincue, se rendirent aux forces américaines.
Par le traité très humiliant de Guadeloupe Hidalgo, signé le 2 février 1848, le Mexique céda aux États-Unis pour 15 millions de dollars, le Texas, la Californie, l’Utah, le Nevada, le Colorado, le Wyoming, le Nouveau-Mexique et l’Arizona.
1.4 La situation du Mexique en 1860 nécessitait de trouver un partenaire étranger
En 1861, le gouvernement mexicain dirigé par Benito Juarez Garcia, contraint par la situation économique catastrophique du pays depuis l’indépendance, avait souscrit plusieurs emprunts importants et devait plus de 70 millions de pesos à l’Angleterre, plus de 9 millions à l’Espagne et plus de 3 millions à la France.
Dans son très intéressant ouvrage de 1994, « Napoléon III et le Mexique« , Jean-François Lecaillon explique avec détail la raison fondamentale qui attira au Mexique, les émigrants européens à partir de 1860 : « Malgré son archaïsme, le Mexique s’avérait donc riche en potentialités. Telle était, du moins, la conviction des contemporains, lesquels ne possédaient pas de mots assez flatteurs pour vanter ce qu’ils considéraient comme un nouvel Eldorado et entretenir la légende de la richesse mexicaine ».
Toujours, d’après Jean-François Lecaillon : « En 1860, le Mexique comptait un peu plus de 8,5 millions d’habitants, dont 4 millions d’Indiens, 2,5 millions de Métis et 2 millions de Blancs ».
On n’a pas de chiffre précis concernant la désertion des Espagnols « royalistes » qui ont quitté le pays, mais au-delà de la fuite importante de capitaux, le changement essentiel fut que la plupart des Créoles ou « Criollos » (Espagnols nés au Mexique) les remplaçât plus ou moins bien dans la gestion des affaires.
Jean-François Lecaillon décrit, avec l’appui de nombreux témoignages vécus, une situation dans tout le Mexique de 1860, qui s’apparente à la période médiévale en France. Il présente de nombreux personnages importants, basés dans leur hacienda fortifiée, tels nos vieux châteaux forts, d’où ceux-ci exploitaient d’une main de fer une population, plus ou moins importante, de Métis et d’Indiens dévoués ou contraints.
Les nouveaux « seigneurs » étaient majoritairement des criollos. Profitant des guerres d’indépendance avec l’Espagne, ils avaient remplacé les « seigneurs » espagnols nés en Espagne qui avaient été contraints de fuir vers l’Europe ou les États-Unis.
En 1860, il n’y avait pas un peuple mexicain mais une mosaïque de castes, plus ou moins pauvres et incultivées, sans aucune véritable volonté de bâtir une nation unie et dont la misère était l’horizon individuel.
Au-delà des nombreux conflits pour l’indépendance ou la construction d’une République, le Mexique était secoué depuis plus de cinquante ans par des révoltes récurrentes interethniques indiennes.
Aucune région du Mexique n’était épargnée. Parmi toutes ses nombreuses tribus indiennes (50 % des habitants en 1860), aucune n’avait été considérée et intégrée à la construction du pays. Ces révoltes continuelles touchaient aussi bien les villes, y compris la capitale Mexico, que les campagnes.
Après 40 années de bouleversements, de guerres, de révoltes et de tentatives infructueuses, pour construire ce pays, toutes les classes dirigeantes finirent par concrétiser le besoin d’avoir une aide extérieure et d’un partenaire, suffisamment puissant et motivé pour solutionner, enfin leurs problèmes. Or, le choix potentiel était très limité.
Hormis les États-Unis, dont la guerre de sécession venait de débuter et qui auraient probablement intérêt à profiter de la situation, il ne restait que l’Angleterre, l’Espagne et la France.
Encore fallait-il pouvoir intéresser l’un ou l’autre de ces pays, auxquels le Mexique avait une dette globale de plus de 82 millions de pesos.
En juillet 1861, acculé dans une situation économique catastrophique, le nouveau président du Mexique, Benito Juarez, remplaçant Miguel Miramon, a été contraint de trouver au plus vite une solution.
Il décida unilatéralement de reculer de deux ans le remboursement des emprunts contractés auprès de l’Angleterre, de l’Espagne et de la France. Évidemment, ces pays vont rapidement réagir.
Benito Juarez apprit que l’ancien général et président, Miguel Miramon, avait aussi contracté un emprunt de 15 millions de pesos, auprès d’un banquier suisse, Jean-Baptiste Jecker, de la Maison Jecker.
Ce banquier, opportunément récemment naturalisé français, enfin conscient de la situation au Mexique, réclama au président Juarez le remboursement intégral de l’emprunt. Ce dernier refusa tout simplement.
L’Espagne fut le premier pays à envoyer en décembre 1861, à Veracruz, un corps expéditionnaire de 6 000 hommes, commandés par le général Juan Prim. Des détachements français de 3 500 hommes et anglais de 700 hommes, les rejoignirent en janvier 1862.
Deux autres détachements français de 3 000 puis de 4 500 hommes rejoindront Veracruz, en avril 1862.
2. Contexte en France en 1860
Après 1860, Napoléon III changea sa politique impériale, en l’orientant vers une gestion plus sociale du pays. Les Chambres et le Sénat intégrèrent de plus en plus de membres de l’opposition, à qui Napoléon III accorda de plus en plus de pouvoir.
Avec la réforme constitutionnelle de 1862 et les sénatus-consultes, Napoléon III va céder aux corps d’État une part importante de la gestion du pays. Le contexte économique et social du pays, après les élections de mai 1863, sera de plus en plus difficile.
Probablement diminué physiquement à cause de la maladie de « la pierre » il céda de plus en plus souvent aux sollicitations de son entourage et même de l’impératrice Eugénie.
C’est à partir de 1860 que Napoléon III est intervenu sans réelle motivation, dans des projets qui auront des conséquences néfastes pour la France, au cours de la décennie suivante.
L’une des causes probables du changement de gouvernance par Napoléon III, à partir de 1860, fut cette célèbre maladie de la pierre, mieux connue au 21ème siècle sous le terme de « coliques néphrétiques » ou « lithiases rénales ».
Cette maladie, qui touche plus les hommes que les femmes, est souvent déclenchée après une période de stress intellectuel intense sur plusieurs années consécutives.
Cette maladie a pour conséquence la sécrétion de cristaux « d’oxalate de calcium » par les reins et une douleur insupportable. Ces cristaux sont le plus souvent progressivement évacués par la vessie après quelques temps. Dans certains cas, une opération peut être nécessaire pour « débloquer » un rein obstrué, ce qui n’était pas possible en 1860.
Cette maladie peut durer parfois plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Elle entraîne des douleurs violentes, incapacitantes physiquement mais aussi intellectuellement. Il devient impossible pour le sujet d’être disponible et en état de raisonner durant toute cette période.
Ces « crises » peuvent se répéter tous les mois ou tous les semestres pendant une dizaine d’années. En 1860, il n’existait pas de traitement pour cette maladie. Au 21e siècle, seules des drogues fortes permettent d’atténuer la douleur. L’utilisation de micro-ondes est souvent préconisée pour réduire la taille de ces cristaux.
1860 fut marqué par le début de projets coloniaux et impériaux par les puissances européennes, mais aussi aux États-Unis.
Le développement de l’industrialisation, du capitalisme et des marchés de plus en plus internationaux va nécessairement et inévitablement entraîner les pays puissants vers des besoins d’élargissement de leurs champs de commerce et d’expansion économique.
Le pendant à ces évolutions fut les guerres, au début entre nations, mais évidemment mondiales par la suite, du fait des alliances négociées.
2.1 Le Mexique vu de la France en 1860
Du point de vue géostratégique, le Mexique, pays en cours de formation, était en pleine ébullition, depuis plus de 40 années. Sa mauvaise gestion et son économie catastrophique limitaient fortement sa valeur à l’échelle de l’économie mondiale.
Situé directement au sud des États-Unis, alors en pleine guerre de sécession, il était de toute évidence une proie facile pour ce pays en cours de modernisation et d’agrandissement. D’ailleurs, les États-Unis ne s’étaient pas privés de prendre possession, par les armes, de la moitié du pays.
La différence de religion, essentiellement protestante aux États-Unis et catholique au Mexique, était le frein fondamental à leur possible fusion. La situation, en 1860, du Mexique, laissant les États-Unis s’agrandir fortement, représentait un réel danger de déstabilisation économique vis-à-vis de l’Europe.
Situé à 5 semaines de navigation à partir des ports français, le Mexique, en tant que colonie potentielle pour la France, représentait trois principaux handicaps.
Le premier était la distance importante qui séparait les deux pays, le second était lié au premier, car pour y débarquer des milliers de soldats, il fallait plusieurs dizaines de navires.
Enfin, le troisième et non des moindres était la proximité immédiate des États-Unis, puissance montante, y compris sur le plan industriel, économique et militaire.
2.2 Évolution de l’emprunt Jecker
Jean-Baptiste Jecker a convaincu le duc de Morny, demi-frère de Napoléon III et président du corps législatif français, de lui racheter les bons de cet emprunt, en échange d’un reversement personnel de 30% du montant total. De fait, la dette du Mexique vis-à-vis de la France passa de 3 à 13 millions de pesos.
Ceci entraîna des conséquences, dans la décision de Napoléon III, quant à investir militairement au Mexique.
En effet, en plus du duc de Morny, de nombreuses personnes comme les ambassadeurs, les consuls, des réfugiés mexicains fortunés, des investisseurs, des industriels et des conseillers de Napoléon III, directement intéressées par une intervention de la France au Mexique, influencèrent l’Empereur.
Suivant l’avis de Jean-François Lecaillon, dans son livre de 1994 : « Mais, si le Mexique remboursait, le duc de Morny était également intéressé à concurrence de 30% ! Un beau capital qui ne pouvait le laisser indifférent. Il chargea donc Saligny (lui-même porteur de grosses sommes en bons Jecker) de mener à bien cette affaire. Dès cet instant, Napoléon III se trouvait donc piégé : les rapports qui lui venaient du Mexique émanant de Saligny lui-même (dans lequel il avait toute confiance), ceux-ci ne pouvaient que le confirmer dans son idée, à savoir que les libéraux (mexicains) n’étaient qu’une bande de voleurs occupés à piller une nation catholique et à rançonner les Français établis sur place ».
2.3 Le Mexique vu par Napoléon III
Pour toutes les affaires relatives au Mexique, Napoléon III accorda toute sa confiance au diplomate français installé dans ce pays depuis 1839, Alphonse Dubois de Saligny.
À Paris, pour les sujets relatifs au Mexique, Napoléon III était entouré et conseillé par diverses personnes, tel le duc de Morny, mais aussi par son épouse, l’impératrice Eugénie.
Cette dernière, d’origine espagnole et fervente catholique, voyait d’un mauvais œil la transformation de l’ancienne colonie royale espagnole en une République, qui plus est, aux frontières des États-Unis, de religion majoritairement protestante.
L’impératrice Eugénie avait été convaincue, par l’un des responsables des exilés mexicains réfugiés à Paris, José Manuel Hidalgo, du bien-fondé d’une restauration catholique conservatrice au Mexique.
Napoléon III fut piégé par l’affaire de l’emprunt Jecker et les conseils de l’ambassadeur de Saligny, mais aussi et surtout par son entourage direct. Tous les conseils adressés à Napoléon III visaient à transformer le Mexique et y établir un protectorat catholique français, sous la direction d’un empereur d’origine européenne.
Son esprit déjà ouvert au « socialisme » depuis son enfance, va contribuer à valider le projet de « l’aventure mexicaine » dans l’espoir, purement utopique, d’aider le peuple de ce pays à construire une nation catholique unie et équitable pour tous.
Pour mettre en œuvre son projet, Napoléon III a dû trouver une personne appartenant à l’aristocratie européenne qui accepterait le « poste » d’empereur proposé par les Mexicains conservateurs.
Pour essayer de se faire pardonner son intervention militaire en Italie en mai 1859, face aux armées de l’Empereur d’Autriche, il va proposer le titre d’empereur du Mexique au frère de ce dernier, l’archiduc Maximilien de la Maison Habsbourg-Lorraine.
2.4 Début de « l’aventure mexicaine »
Napoléon III a profité de la convention de Londres en octobre 1861, qui prévoyait une intervention militaire tripartite (Angleterre, Espagne, France), pour progressivement mettre en place ses idéaux au Mexique, par l’intermédiaire de son corps expéditionnaire.
Les créanciers anglais souhaitaient essentiellement contraindre le Mexique afin qu’il s’acquitte de sa dette, alors que le gouvernement royaliste du Royaume-Uni avait, probablement, privilégié des idées anti-république.
Le gouvernement espagnol, qui souhaitait aussi le règlement de la dette mais aussi une revanche d’avoir été chassé de leur ancienne colonie, la « Nouvelle-Espagne » avait envoyé un corps expéditionnaire important, commandé par le général Juan Prim.
Ce dernier, marié à une Mexicaine, espérait secrètement prendre personnellement le pouvoir à Mexico. Aussi, arrivé au Mexique avant les Français et les Anglais, il avait négocié seul avec Manuel Doblado et signé le 19 février 1862, la convention de Soledad, dans laquelle il précisait que l’Espagne ne souhaitait que le règlement de la dette.
Les Anglais, comme les Français, désavouèrent les initiatives du général Prim.
L’ambassadeur de France, Alphonse Dubois de Saligny, fit lui aussi valoir auprès du gouvernement mexicain les griefs de son pays. A l’instar de ses alliés, il réclama le paiement de la dette.
Cependant, de Saligny exigea en plus, le versement comptant de 12 millions de pesos. Cette exigence, comme prévue, fut évidemment rejetée par le gouvernement mexicain. Elle fut aussi non validée par les Anglais, pour qui, le Mexique avait la dette la plus importante (70 millions de pesos).
Napoléon III, par son intermédiaire sur place, l’ambassadeur de Saligny, avait envisagé de mettre fin militairement au désordre politique qui s’était installé au Mexique depuis cinquante ans. Évidemment, les Anglais et les Espagnols n’étaient pas dans la confidence.
Ces derniers, surpris et déçus de l’attitude de l’ambassadeur de France, finirent par quitter le Mexique en avril 1862, laissant les Français seuls, dans le bourbier qu’ils étaient en train de construire.
Le corps expéditionnaire français était le plus important. La première partie de ces troupes, composées de 3 500 soldats ou marins, débarquèrent à Veracruz le 4 janvier 1862.
Le même jour, une légion belge de 4 000 hommes accompagnait les Français. En effet, comme envisagé secrètement par Napoléon III et fort probablement négocié avec le roi des Belges, Léopold 1er, la future impératrice et épouse de Maximilien, était Charlotte de Belgique, la fille du roi.
Les troupes françaises, envoyées progressivement au Mexique de 1862 à 1867, atteignaient 38 493. Dans ce pays chaotique, si loin de la France, en cinq ans, 6 654 soldats français perdirent la vie lors de batailles ou de maladies.
Très rapidement, les officiers français envoyés au Mexique se rendirent compte de l’état de délabrement politique et économique du pays. La présence de l’armée française dans ce pays fut de plus en plus vivement critiquée par l’ensemble des cadres militaires.
Ces derniers, après la première bataille en mai 1862 et l’échec devant Puebla, suite à des erreurs de commandement, vont remporter plusieurs victoires importantes, de Puebla reconquise jusqu’à la capitale Mexico.
Le commandant du corps expéditionnaire français, le général Charles Ferdinand Latrille de Lorencez, en conflit avec l’ambassadeur de Saligny, fut remplacé par le général Elie-Frédéric Forey.
Ce dernier, bien que sa compétence sur le champ de bataille fût mise en doute par de nombreux témoins, fut nommé maréchal de France en 1863. Fort heureusement pour lui, il était secondé par un général particulièrement performant, le général François Achille Bazaine.
En dehors de ces quelques batailles, les troupes françaises ont partagé leur temps entre des opérations de maintien de l’ordre et des moments de profonds ennuis. De nombreux groupes de bandits sévissaient en tout temps et partout dans le Mexique.
Tous les militaires français, ou presque, se demandèrent ce qu’ils étaient venus faire dans cette « galère » en attendant avec impatience le retour vers la France.
Comment pouvait-il en être autrement ? Pour les armées françaises, comme pour toutes les armées du monde, la vocation d’un militaire est de faire la guerre, en vue de conquérir des territoires, ou pour défendre sa patrie.
Confier des missions de pacification et/ou de police et de maintien de l’ordre dans un pays autre que le sien se termine toujours, à plus ou moins long terme, par un échec. Napoléon III n’avait ni l’expérience, ni la compétence, ni la formation pour l’envisager, avant de se lancer dans cette « aventure mexicaine ».
Ses idées « humanistes » et « socialistes » n’étaient pas un atout pour comprendre et anticiper ce futur désastre au Mexique.
De plus, Napoléon III, pour des raisons « utopiques » ajouta une difficulté supplémentaire quasi irréalisable aux missions des militaires français.
Cette difficulté était de mettre en place et soutenir un Empereur, étranger aux Mexicains et même à l’armée française, dans ce pays en ébullition où toutes les bases indispensables de stabilité politiques et économiques étaient inexistantes.
L’empereur du Mexique Maximilien 1er était d’origine autrichienne. Il était le frère de l’empereur d’Autriche François-Joseph 1er de la Maison Habsbourg-Lorraine.
Mon affirmation ici est basée sur des constats du 19e, mais aussi du 20e et du 21e siècle. Comme on le verra quelque temps plus tard, la France, avec des missions de pacification et de maintien de l’ordre, a toujours échoué. Ce fut le cas au Vietnam, en Algérie et au Mali.
Ce constat est aussi valable pour la Russie. Cette dernière, dans les mêmes conditions, a échoué dans certains pays européens, mais aussi en Afghanistan et en Ukraine. Idem, pour les Anglais, au Canada, en Inde et aux États-Unis.
Enfin, mêmes conséquences et pour les mêmes causes, par les États-Unis, au Vietnam, en Somalie, en Irak et en Afghanistan.
Les missions de maintien de l’ordre ou de police sont incompatibles avec l’esprit de conquête des militaires.
Le 3 octobre 1863, une députation de conservateurs mexicains, présidée par José Maria Gutiérrez Estrada, avec l’appui de Napoléon III, avait proposé à Ferdinand Maximilien d’Autriche la couronne impériale du Mexique.
Son frère François-Joseph 1er, trop heureux de se débarrasser du futur héritier de la couronne d’Autriche, et Napoléon III invitèrent expressément Maximilien à accepter la proposition mexicaine.
Ce dernier, âgé seulement de 31 ans, après une longue hésitation de plusieurs mois, conditionna son acceptation à la tenue d’un référendum populaire et des garanties financières et militaires.
Ce Second Empire mexicain a été reconnu par les principales puissances européennes, dont la France, le Royaume-Uni, l’Espagne, la Belgique, l’Autriche et la Prusse. Les États-Unis, bien évidemment, ont continué à soutenir l’opposition, les insurgés républicains mexicains de Benito Juarez.
Calculateur et opportuniste, Maximilien avait épousé le 27 juillet 1857 la princesse Charlotte de Belgique, âgée de seulement 17 ans. Maximilien n’était pas vraiment amoureux, mais très intéressé par la dot et les avantages que lui apporta la fille du roi des Belges.
Dans la salle du trône du château de Miramare, près de Trieste en Vénétie, Maximilien devient officiellement empereur du Mexique, le 10 avril 1864. Le départ, avec l’impératrice Charlotte, vers le Mexique, avait été fixé au 14 avril 1864.
Le nouvel empereur Maximilien 1er et l’impératrice Charlotte arrivèrent à Veracruz au Mexique, le 28 mai 1864. Ils rejoignirent la capitale Mexico, le 12 juin 1864 et s’installèrent provisoirement au palais national de Mexico.
Fortement déçus par l’état de délabrement du palais national de Mexico, ils s’installèrent au château de Chapultepec, ancienne résidence d’été du vice-roi d’Espagne, Bernardo Galvez.
Du 10 août au 30 octobre 1864, il fit la découverte à cheval de son empire. Il visita l’État du Querétaro, puis les villes de Celaya, Irapuato, Dolores Hidalgo, Léon de Los Aldamas dans l’État du Guanajuato, Morelia dans l’État d’Ocampo, Toluca dans l’État de Mexico.
La politique qu’il essaya de mettre en place était trop libérale et trop « sociale » pour les conservateurs mexicains qui l’avaient amené au pouvoir. Il finira par décevoir tous les partis politiques, y compris son épouse Charlotte, lorsqu’il décida d’adopter en septembre 1865, les deux petits-fils de l’ancien empereur du Mexique, Augustin 1er.
L’un des deux enfants était le fils de madame Iturbide, de nationalité américaine. Ce qui entraîna une violente réaction de la part de la Chambre des représentants aux États-Unis.
Maximilien 1er n’avait aucune compétence pour gérer un pays comme le Mexique, sans organisation administrative, sans stabilité politique et économiquement en permanence au bord du désastre.
Impétueux, il finira par se mettre à dos tout son entourage et reprocher aux troupes françaises, pourtant très efficaces et très populaires chez la plupart des Indiens du Mexique, ses mauvais résultats personnels.
D’autre part, les forces armées européennes en présence au Mexique avaient des missions antagonistes. Les détachements belges avaient, au départ, une mission de garde et d’escorte de l’impératrice Charlotte.
En effet, fille du roi des Belges, Léopold 1er, la princesse Charlotte était devenue l’épouse de Maximilien avant leur départ pour le Mexique. Son père lui octroya un détachement de 4 000 soldats belges, en complément de la dot.
Ces soldats n’avaient aucune formation au combat et eurent de grandes difficultés à s’adapter et à se motiver dans les missions de pacification et de guerre au Mexique.
Il en était de même, pour le détachement de 7 000 soldats autrichiens, fourni à Maximilien par son frère l’empereur d’Autriche, François-Joseph 1er. Ces soldats autrichiens refusaient les ordres des généraux français, responsables de l’ensemble du corps expéditionnaire.
Jean-François Lecaillon, dans son ouvrage « Napoléon III et le Mexique » de 1994, cite de nombreux témoignages dans les courriers des militaires, concernant les accrochages et disputes fréquentes entre ces forces armées.
Le manque de motivation et de formation des uns et l’absence de discipline des autres auraient souvent contrecarré les opérations de guerre et de pacification des forces françaises au Mexique.
2.5 La bataille de Cameron en avril 1863
Durant toute la durée de cette « aventure mexicaine » les troupes françaises n’ont jamais démérité. La bataille de Cameron (Camaron de Tejeda) le 30 avril 1863, est restée dans les mémoires de tous les combattants qui y ont participé.
Alors que le gros des forces du corps expéditionnaire français s’apprêtait à faire le siège de Puebla, situé à 80 km de Veracruz, une compagnie de la « légion étrangère » composée de trois officiers et 62 « légionnaires » a été envoyée au-devant d’un convoi, en provenance du port de Veracruz.
Cette compagnie avait pour mission, après une marche forcée de 24 km, de « sécuriser » les abords de Palo Verde et attendre le convoi. À peine furent-ils arrivés à Palo Verde qu’ils repérèrent de très nombreux Mexicains armés et à cheval. Les premiers coups de feu claquèrent dans la direction des Français.
Étant à découvert, la compagnie recula jusqu’à atteindre un petit groupe de maisons appelé Camaron de Tejeda. Les « légionnaires » se barricadèrent à l’intérieur alors qu’ils étaient chargés par 300 cavaliers « irréguliers » du colonel mexicain Milan.
Les légionnaires avaient adopté une formation en « carré » et ripostèrent face aux cavaliers. Les Mexicains, surpris par l’efficacité de la défense, perdirent de nombreux cavaliers. Les cavaliers prirent la fuite.
La compagnie de « légionnaires », avec un blessé léger, se déplaça derrière une haie de cactus pour prendre une position en hauteur. Les cavaliers qui chargèrent à nouveau, furent contraints de reculer face à l’efficacité des tirs provenant des Français.
Le capitaine Danjou, commandant la compagnie et ses légionnaires se réfugièrent dans une hacienda (maison traditionnelle), pourtant en mauvais état. Dans leur malheur, les deux mules qui portaient les vivres et les munitions, effrayées par le bruit des armes, échappèrent à leur contrôle et suivirent les chevaux des cavaliers.
Pendant ce temps, le reste des troupes mexicaines, soit 1 200 fantassins et 500 cavaliers « réguliers » avaient rejoint les 300 cavaliers « irréguliers ». Sous les ordres du colonel mexicain Francisco de Paula Milan, les fantassins attaquèrent l’hacienda où s’étaient barricadés les Français.
Après s’être réfugiés dans l’hacienda, les légionnaires repoussèrent les assauts pendant plus de neuf heures. À chaque assaut, des légionnaires furent tués ou blessés. En fin d’après-midi, vers 17 h, après de vifs combats, sans manger, sans repos et sous un soleil de plomb, il ne restait que douze hommes en capacité de se battre.
Le capitaine Danjou fut tué d’une balle en plein cœur vers 12 h, il fut remplacé par le sous-lieutenant Jean Vilain. Vers 14 h, ce fut le tour du sous-lieutenant Jean Vilain de tomber, une balle en plein front. Il sera remplacé par le troisième et dernier officier, le sous-lieutenant Clément Maudet.
En fin d’après-midi, les Français étaient arrivés au bout de leurs munitions. Au signal du sous-lieutenant Clément Maudet, les survivants, le caporal Louis-Philippe Maine, les légionnaires Victor Catteau, Geoffroy Wensel, Laurent Constantin et Jean-Baptiste Leonard chargèrent à la baïonnette.
Victor Catteau, légionnaire d’origine belge, meurt criblé de 19 balles en protégeant le sous-lieutenant.
C’est alors que le calme revenu, un officier mexicain d’origine française, le lieutenant Ramon Laisné, aux ordres du colonel Angel Lucido Cambas, somma les Français de se rendre.
Le caporal Louis Philippe Maine répondit : « Nous nous rendons si vous faites la promesse la plus formelle de relever et de soigner notre sous-lieutenant et tous nos camarades atteints, comme lui, de blessures ; si vous nous promettez de nous laisser notre fourniment et nos armes. Enfin, nous nous rendrons, si vous vous engagez à dire à qui voudra l’entendre que, jusqu’au bout, nous avons fait notre devoir. »
L’interlocuteur du caporal lui répondit : « On ne refuse rien à des hommes comme vous » puis ajouta « Mais parlez-moi en français, mes hommes pourraient croire que vous êtes des Espagnols du parti conservateur, et ils vous massacreraient ».
Les Français survivants furent présentés au colonel Francisco de Paula Milan qui s’écria en espagnol « Mais ce ne sont pas des hommes, ce sont des démons ».
Le bilan de cette bataille fut côté français, 40 morts et 18 blessés. Les Mexicains perdirent 190 fantassins ou cavaliers et comptabilisèrent plus de 300 blessés.
Lorsque les renforts français arrivèrent enfin sur les lieux de cette bataille, il ne restait que les cadavres français et mexicains. Dans les alentours, ils retrouvèrent Casimir Laï, un légionnaire laissé pour mort, le tambour de la compagnie.
Il avait été blessé de sept coups de lance et de deux balles. Il raconta la bataille et ses explications servirent au premier compte-rendu officiel. Il fut décoré de la croix de chevalier de la Légion d’honneur le 14 août 1863.
Les survivants, blessés ou prisonniers furent soignés par les Mexicains. Huit légionnaires furent échangés, trois mois plus tard, contre deux cents Mexicains, capturés par la contre-guérilla, du colonel Charles-Louis Du Pin.
2.6 Fin de « l’aventure mexicaine »
À partir d’avril 1865, comme la guerre de sécession aux États-Unis était terminée, le président américain Andrew Johnson reconnut officiellement le gouvernement insurrectionnel de Juarez et lui permit l’installation de dépôts d’armes sur le territoire américain du Texas.
Les relations avec les États-Unis, qui n’acceptaient pas la présence d’un empire à ses portes, dirigé par un Européen, s’étaient fortement dégradées. Les perspectives de plus en plus grandes de voir une invasion américaine au Mexique, pour soi-disant rétablir le gouvernement de Juarez, entraînèrent la fuite de nombreux soutiens à Maximilien.
En janvier 1866, Napoléon III décida le retrait progressif des troupes françaises du Mexique. L’objectif du retrait final fut fixé à l’automne 1866, mais ne put se réaliser qu’au printemps 1867.
L’impératrice Charlotte quitta le Mexique le 9 juillet 1866 afin d’essayer de rencontrer Napoléon III et le convaincre de revenir sur sa décision. Son voyage en Europe se solda par un échec.
Maximilien a dû faire face à une armée de plus en plus grande et homogène, dépendante des libéraux mexicains dirigés par Juarez. Celle-ci, aidée par les États-Unis, finira par occuper la plus grande partie du Mexique.
Le général du Martray, présent au Mexique en mars 1866, du côté de Matamoros, avait noté la présence dans l’armée de Juarez, de troupes étrangères composées de plus de 6 000 Américains et/ou d’Irlandais.
Maximilien, un instant tenté par l’abdication, se retrancha, le 19 février 1867, à Santiago de Querétaro avec ses généraux et son armée mexicaine de 9.000 hommes. Dans cette ville comme à Mexico, à Veracruz et Puebla, la population lui était encore favorable.
Le 5 mars 1867, la ville de Santiago de Querétaro fut assiégée par les armées du général libéral Mariano Escobedo. Le siège dura jusqu’au 15 mai 1867. Ce jour-là, Maximilien fut trahi par le colonel Miguel Lopez, qui ouvrit une porte de la ville permettant l’accès au couvent « le Cruz » où résidait Maximilien.
Maximilien fut capturé et jugé le 13 juin 1867, où il fut condamné à mort en même temps que ses généraux Miramon et Mejia. Benito Juarez, refusant de les gracier, ils furent fusillés le mercredi 19 juin 1867.
Son corps fut rapatrié en Autriche et repose depuis le 18 janvier 1868, dans la crypte familiale des « Capucins » à Vienne.
Si « l’aventure mexicaine » ne fut pas, côté français, marquée par un échec militaire, bien au contraire, elle fut cependant un véritable désastre financier pour la France.
Non seulement la France n’a pas récupéré la dette que le Mexique lui devait, mais elle a pris à sa charge tous les frais liés au corps expéditionnaire français et le paiement des salaires des troupes mexicaines, qu’il avait fallu recruter au profit de l’empereur Maximilien.
D’autre part, les militaires d’intendance français ont dû payer, souvent très chères, les provisions achetées sur place aux Indiens mexicains.
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