Louis XIII

1. Contexte initial

À la mort de son père Henri IV, assassiné par Ravaillac, le 14 mai 1610, Louis XIII, fils aîné d’Henri IV, devient roi alors qu’il n’a que 9 ans. Sa mère, Marie de Médicis a été nommée régente, par le Parlement le 15 mai 1610, date prévue à l’avance, en prévision du départ d’Henri IV pour la nouvelle guerre, contre l’allié du Saint Empire Maison d’Autriche, l’Espagne et plus particulièrement en Pays-Bas Espagnols (actuellement Picardie, Flandre, Belgique, Luxembourg).

Après une décennie de paix, le ministre d’Henri IV, Sully avait réussi à convaincre le roi, de rouvrir les hostilités, avec le Saint Empire (Maison d’Autriche) avec lequel l’Espagne était alliée.

Dès la mort d’Henri IV, la régente et reine mère Marie de Médicis, écarte les ministres de son époux et s’appuie sur le couple et compatriote Italien, Concino Concini et sa femme Leonora Galigaï. Marie de Médicis, proche du Saint Empire catholique, tourne le dos à la politique mise en place par Henri IV, avec beaucoup de difficultés, en favorisant un rapprochement avec l’Espagne.

Cette nouvelle orientation de politique pro-catholique se confirme par la négociation du mariage du jeune roi Louis XIII, avec l’infante d’Espagne Anne d’Autriche, de la Maison des Habsbourg. Cette union sera célébrée en 1615, les jeunes époux n’ont que 14 ans.

En réaction à ce réveil des conflits entre catholiques et réformés ou protestants, le prince de Condé (Maison des Bourbons) entraîne les grands seigneurs anti-catholiques, dans une révolte contre Concini à partir de 1614.

La régente Marie de Médicis, convoque les États généraux, qui se déroulèrent à partir du 26 octobre 1614. Déjà à cette époque, dès le début des États généraux, les trois ordres (Noblesse, clergé et Tiers état) se disputèrent pour affirmer, voire confirmer leurs privilèges.

La féodalité aristocratique terrienne, souffrait d’avoir perdu au fil du temps son pouvoir politique et se sentait déjà menacée, par l’ascension sociale des « gens de robe » (magistrats et avocats présents en grand nombre au sein du Tiers état). Ces nouveaux riches bourgeois, aspiraient à la noblesse et ses privilèges. Ceux-ci, pouvaient désormais transmettre leurs offices à leurs enfants.

Marie de Médicis, à la séance de clôture des États généraux, le 23 février 1615, confirme Concini dans son pouvoir, mais en mai 1616, au traité de Loudun, elle dut céder charges et gratifications en grand nombre, au prince de Condé, premier prince du sang et à ses partenaires.

Par peur d’événements dramatiques possibles le concernant, Concini fit arrêter et emprisonner le prince de Condé, ce qui déclencha la troisième révolte des « Grands » derrière les ducs de Nevers, de Bouillon et de Mayenne. Marie de Médicis, forma un gouvernement de combat, destiné à restaurer l’autorité de l’État avec à sa tête Concini et Monseigneur de Luçon, le futur Richelieu.

Concini avait commis plusieurs erreurs graves en négligeant le roi Louis XIII, officiellement majeur depuis 1614. Il considérait le jeune roi pour un incapable. Il avait multiplié à son encontre diverses insolences et d’ostensibles marques de mépris.

À 16 ans, le jeune roi enrageait en silence et ne supportait plus l’attitude de cet individu, mais aussi de sa mère Marie de Médicis, qui s’accrochait au pouvoir en le renvoyant à ses chasses et ses jeux puérils.

Avec un petit groupe de fidèles, Louis XIII, prépara une conspiration qui permit de faire éliminer définitivement Concini, le 24 avril 1617. Sa femme Galigaï, accusée de sorcellerie fut décapitée. Quant à sa mère, Marie de Médicis, elle fut exilée au château de Blois.

À cette nouvelle, Louis XIII exulta. « Maintenant, je suis roi ! Oui Dieu soit loué, me voilà roi ! » Louis XIII, entra enfin en scène. Celui-ci, rappelle quelques vieux conseillers de son père et installe comme ministre, son ami Charles d’Albert, duc de Luynes.

Ce dernier, profitant de la jeunesse de Louis XIII et de son inexpérience en politique (il a presque 17 ans), récupéra la fortune et les titres de Concini. Le duc de Luynes, devient très vite, par ses excès, détesté par le peuple et les nobles.

 

2. Biographie

Louis XIII, est né au château de Fontainebleau, le 27 septembre 1601. Dans sa jeunesse, qu’il passera auprès de ses frères et sœurs (légitimes et illégitimes) au château de Saint-Germain-en-Laye, il est décrit comme un garçon aimable, charitable, aux goûts artistiques prononcés, passionné de dessin, de peinture et de musique. Vite susceptible, autoritaire, tenace et colérique.

D’être le futur roi, lui donnait une très haute conscience de sa naissance et un indéniable complexe de supériorité, vis-à-vis de ses demi-frères bâtards légitimés, qu’il haïssait (les deux Vendôme, le duc de Verneuil, le comte de Moret). Son père Henri IV, pour tenter de briser son orgueil, n’avait pas hésité à le faire plusieurs fois fouetter.

Louis XIII, souffrait de cruels dérangements intestinaux, qui l’assaillaient périodiquement et qui, à partir de 1627 se transformèrent en entéropathie chronique (certains diront maladie de Crohn). À cette déficience physique, s’ajoutait un bégaiement, à l’origine de sa timidité et de son mutisme habituel.

Louis XIII, était mélancolique. Pour sa défense, il avait perdu très jeune son père et sa mère, très froide avec lui, réservait ses caresses d’affection, à son frère cadet (Gaston duc d’Orléans). Méfiant, secret, ombrageux, il riait peu, plaisantait rarement et se trouvait paralysé devant les femmes.

Louis XIII, entendait être obéi de tous. Malgré sa simplicité naturelle et son dédain du décorum, il avait le sens inné de la majesté et de la dignité royale. Il avait une passion immense, non pour sa gloire personnelle, mais pour son royaume.

 

3. Reconquête et construction du royaume

Marie de Médicis, qui s’est réconciliée avec son fils Louis XIII, après lui avoir fait la guerre, profite de la mort du duc de Luynes en 1621, pour placer près du roi un de ses protégés : Armand Jean du Plessis de Richelieu, ex Monseigneur l’évêque de Luçon, déjà présent aux États généraux de 1614.

Celui-ci, qui avait servi Concini et soutenu le parti dévot (pro-catholique) avait suivi la reine mère Marie de Médicis dans sa disgrâce à Avignon, puis à Angoulême. Richelieu, faisant partie de l’entourage de Marie de Médicis, il est de retour à la cour du roi. Il obtient le chapeau de cardinal, en 1622 par relation avec le parti dévot qui se méfie du roi.

Il faudra du temps pour construire une véritable relation de confiance entre Louis XIII et Richelieu. Celui-ci, au Conseil du roi en 1624, il lui faudra attendre 1629, pour recevoir le titre de « principal ministre de l’État ».

Louis XIII, aidé de Richelieu (celui-ci au pouvoir près du roi, s’est détourné du parti dévot Espagnol), poursuivra une véritable politique à l’intérieur, visant à abaisser la noblesse factieuse et en désarmant les organisations politico-militaires des huguenots. À l’extérieur, il prendra des mesures pour lutter contre les agressions de la Maison d’Autriche (le Saint Empire et ses alliés).

Luttant contre les nombreuses rebellions et conspirations, la priorité de ce binôme (Louis XIII et Richelieu) sera de restaurer l’autorité de l’État, au sein du royaume. Ce qui entraîne Louis XIII, mais aussi Richelieu, à écraser militairement divers conflits sur le territoire avec quelques nobles, proches de Marie de Médicis ou de son frère cadet Gaston d’Orléans, mais aussi avec les Anglais, les Espagnols, les huguenots.

L’édit de grâce d’Alès en 1629, corrigeant l’édit de Nantes (1598), supprime la centaine de places de sûreté (diverses villes) huguenotes, qui échappaient encore à l’autorité royale. C’est la fin du protestantisme, conçu comme un parti politique (un État dans l’État).

À l’extérieur, la politique prioritaire du roi et mise en application par Richelieu, est la déstabilisation et l’affaiblissement de la puissance du Saint empire (Maison des Habsbourg et ses alliés pro-catholiques), en aidant financièrement et par la suite militairement, les protestants allemands, suisses et savoyards, mais aussi en signant des alliances avec le roi du Danemark Christian IV et le roi de Suède Gustave-Adolphe. Le champ de bataille, s’est étendu à une grande partie de l’Europe. On se bat dans le nord et l’est de la France, mais aussi en Allemagne, en Italie, en Espagne, aux Pays-Bas.

Cette stratégie anti-espagnole heurte profondément Marie de Médicis, qui exige le renvoi de Richelieu, le 11 novembre 1630.

Contrairement à l’attente de la reine mère, Louis XIII, confirme Richelieu, dans ses fonctions, ce qui entraîne le départ de Marie de Médicis. Elle quitte définitivement la France pour, au début, les Pays-Bas Espagnols, puis la Hollande, l’Angleterre et enfin Cologne où elle mourra en 1642.

Après cette date, Richelieu assumera encore quelques années le « bouclier » de Louis XIII sur de nombreuses conjurations incluant parfois des personnages très proches du roi. En 1642, Cinq-Mars et son ami François de Thou (tous deux proches relations de Louis XIII), impliqués dans une conjuration sont exécutés, à Lyon tandis que le duc de Bouillon est dépouillé de la principauté de Sedan et Gaston d’Orléans (frère cadet du roi) doit une nouvelle fois faire amende honorable.

Richelieu, décédera en décembre 1642 et Louis XIII, appellera au Conseil, son collaborateur principal le cardinal Jules Mazarin.

À l’extérieur, ce sera, après la mort de Louis XIII, le 14 mai 1643, la victoire des français et des suédois, sur la coalition du Saint Empire et de l’Espagne, qui termine une guerre de trente ans, par le traité de Westphalie en octobre 1648. La France et la Suède, déclarées garantes des « libertés germaniques », exercent dorénavant une forme de tutelle sur l’Allemagne. Le Saint Empire est abaissé à la frontière sud de l’Allemagne.

 

4. Faits marquants à retenir de cette période

4.1 Forte poussée de l’État central

L’entrée en guerre de la France, fut un puissant accélérateur de la centralisation monarchique et l’unification de l’État-nation, poussant Louis XIII et Richelieu, à restreindre l’autonomie des états provinciaux et des Parlements (magistrats, avocats), tout en accroissant la fiscalité. Le budget, qui se situait autour de 40 millions de livres par an entre 1620 et 1630, bondit à 208 millions en 1636 avant de redescendre à 120-140 millions.

Les dépenses militaires, s’établissaient aux alentours de 20 millions annuels, au début du règne de Louis XIII, pour atteindre 80 millions entre 1635 et 1642.

Pour les financer, Richelieu usa de tous les expédients possibles : Augmentation de la Taille, de la Gabelle et des Octrois, réduction des gages des titulaires d’offices, mise en vente de nouveaux offices… La ponction fiscale n’avait jamais été aussi forte depuis Louis XI. L’administration royale, elle-même dépassée, dut renoncer à la perception des impôts indirects.

En dépit de ces mesures, les ressources manquaient, contraignant l’État à emprunter à taux usuraire à des financiers privés, voire à ses propres officiers comptables, receveurs ou trésoriers généraux. Une caste de manieurs d’argent (genre de nouveaux banquiers), issus de la noblesse de robe (magistrats, avocats) et de l’aristocratie émergea, s’enrichissant rapidement.

La violence fiscale s’ajoutait à la « dureté des temps ». La famine sévissait en raison de mauvaises récoltes, d’où la flambée de révoltes provinciales : « croquants du Périgord » du Poitou ou de Guyenne (16361637), du Maine et d’Anjou (1639), « nu-pieds » de Normandie (1642)…

4.2 Économie, commerce et marine

Durant tout le règne de Louis XIII, alors que se jouait le destin du pays, le cardinal Richelieu œuvra toujours dans le sens du renforcement du royaume. Celui-ci estimait que la prospérité générale résidait dans le développement économique intérieur. Celui-ci devait être axé sur une production de qualité, l’accroissement des exportations de produits manufacturés, la diminution des importations et l’accumulation d’or et d’argent provenant des recettes commerciales.

Richelieu, encouragea les manufactures de draps, de verre, de miroirs pour concurrencer les produits étrangers. Convaincu de la nécessité d’un empire des mers, il poussa à la formation de compagnies commerciales, la Compagnie du Morbihan, celle de Nouvelle-France, celle des îles d’Amérique et à l’implantation d’établissements au Canada, aidant cette région et celle du Québec à leur expansion.

Richelieu, savait qu’il ne pouvait y avoir de politique de grandeur à l’extérieur, sans l’existence d’une puissante flotte de guerre. Aussi, sous sa direction, il lança un effort très important de construction navale, avec l’objectif de détenir la maîtrise des mers et des convois. En 1642, pourtant parti de loin, la France alignait 60 vaisseaux de ligne et 22 galères.

À la mort de Richelieu, la France était devenue la troisième puissance navale d’Occident, derrière l’Angleterre et les Provinces-Unies des Pays-Bas.

4.3 Le renouveau religieux et culturel

Après l’épisode désastreux des guerres de religion, la mise en place de la Contre-réforme catholique fut une lame de fond à la fois théologique, catéchétique et missionnaire. De nombreuses régions étaient devenues terre de mission et de reconquête pour l’Église catholique. Des prédicateurs parcoururent les provinces et les pèlerinages se succédaient.

Face au protestantisme, qui commençait à se replier sur lui-même, le renouveau du catholicisme était évident et ne tarda pas à influencer la sphère politique.

Parallèlement, était né un nouveau courant, issu de la « réformation catholique » le jansénisme, du nom de l’évêque d’Ypres, Cornelius Jansen, auteur de « l’Augustinus » publié en 1640.

En dehors du domaine religieux, Richelieu a joué un rôle notable en tant que protecteur des arts et des lettres. C’est à lui, que l’on doit, la nouvelle Sorbonne, la Bibliothèque (future Bibliothèque nationale), l’Imprimerie royale et le Palais-Cardinal, légué à Louis XIII, celui-ci deviendra le Palais-Royal.

En 1635, Richelieu crée l’Académie française, composée de quarante membres. Celle-ci avait pour fonctions d’établir les règles sûres de la langue française, à travers une grammaire, un dictionnaire, une rhétorique et une poétique. Les membres permanents avaient aussi, pour mission de non seulement rendre la langue élégante, de l’embellir et d’être capable de traiter tous les arts et toutes les sciences.

L’objectif politique que s’était fixé Richelieu, en créant l’Académie française, autour de la langue française, par sa codification, sa complexité, sa richesse était de mobiliser une élite cultivée, au service du rayonnement et de la gloire du royaume de France.

 

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