La Terreur

1. Robespierre et la Terreur, contexte précédant cet épisode

Après la déclaration de guerre de la France le 20 avril 1792, adressée à l’empereur du Saint-Empire François II, qui venait juste de succéder à son père Léopold II, il fallait recruter et former rapidement des officiers, car l’armée française était entièrement désorganisée. Parmi la population, surtout en province, il n’y avait aucun enthousiasme à prendre part à cette guerre.

Contrairement au mythe largement diffusé par les responsables des Républiques ultérieures, ce ne sont pas des volontaires qui vont se battre, mais bien des hommes désignés, au sein de chaque commune. Beaucoup, ne partageant pas les illusions parisiennes, déserteront ou choisiront l’insoumission.

Cette mascarade d’armée française, sous la conduite de Rochambeau, Général en chef de l’armée du Nord, héros de la bataille de Yorktown aux États-Unis, prit l’offensive en Belgique.

Sur les trois colonnes composant son armée, deux se débandèrent dès les premiers coups de feu. Il s’agissait de l’armée commandée par Armand-Louis de Gontaut Biron, duc de Lauzun et compagnon de Rochambeau à Yorktown, qui marchait sur Mons, et celle dirigée par Theobald de Dillon, autre compagnon de Rochambeau lors de la campagne des États-Unis, qui avançait sur Tournai.

De retour près de Lille, Theobal de Dillon, Maréchal de camp, fut lynché par ses soldats. Informé de ce désastre, La Fayette, qui commandait l’armée du Centre, le corps principal de l’armée, avec comme objectif Namur, parti de Metz, a fait stopper ses troupes et exécuta une retraite.

Certains de ses ennemis à l’Assemblée législative prétexteront en juillet 1792 qu’il avait envisagé alors de marcher contre l’Assemblée avec son armée. Le doute dans les esprits des Généraux à cette époque, tous issus de la noblesse, s’était installé et amplifié avec les événements incontrôlés et illégaux provoqués à Paris par la Commune de Paris et les sections factieuses des gauches parisiennes, soutenues par les « sans-culottes ».

Depuis l’épisode de la tentative d’évasion du 20 juin 1791, la Révolution violente est en marche à Paris. La Commune de Paris s’est progressivement octroyée illégalement tous les pouvoirs et va, grâce aux sans-culottes de Paris et de province, faire tomber la monarchie et l’Assemblée Législative. Tout sera planifié depuis juillet 1791, y compris les très nombreuses exécutions de septembre 1792.

À l’approche de l’anniversaire de la prise de la Bastille, de nombreux « sans-culottes », et divers révolutionnaires armés rejoignent la Capitale. Ils se feront appelés les « Fédérés » et, avec les gauches révolutionnaires parisiennes, vont chambouler le calme précaire de juillet et août 1792 à Paris.

Devant le désastre militaire et les grandes difficultés à mettre sur pied une véritable armée, avec de bons officiers, l’Assemblée va déclarer le 11 juillet 1792, « la patrie en danger ». Cet aveu d’impuissance de la part de l’Assemblée Législative sera le déclencheur de l’insurrection générale, celle-ci, commencera à Paris le mois suivant.

En France, l’année 1792 sera le début d’un régime de « Terreur » qui sera progressivement mis en place à Paris, après le basculement le 10 août 1792, de la « Commune de Paris légale » vers la « Commune de Paris insurrectionnelle » qui sera aussi la fin de la monarchie. Le roi et sa famille seront enfermés à la prison du Temple le 13 août 1792.

Cet épisode sera réalisable, après la nomination du nouveau maire de Paris, ami de Robespierre, Jérôme Pétion et du nouveau président de la Commune de Paris, Sulpice Huguenin et ses amis Santerre, chef des « sans-culottes » parisiens, Danton, Hébert, Rossignol.

 

2. Conséquences et suite des événements

Les premiers échecs militaires placent les députés de l’Assemblée Législative dans une situation inconfortable, face au roi, mais aussi, face aux nombreuses milices des gauches révolutionnaires parisiennes, provenant des différents clubs et de la Commune de Paris.

Le roi tentera début juin 1792 de reprendre la main sur les décrets validés par l’Assemblée Législative et pour lesquels, il avait déjà posé son veto.

Un rapport de force s’est clairement établi entre le roi, qui use de sa place et de son pouvoir de veto reconnus par la Constitution de 1791, et les différents éléments, qui composent les factions révolutionnaires parisiennes, renforcées par l’arrivée des milliers de « Fédérés » de la province.

Malheureusement, pour Louis XVI et sa famille, ce combat est largement en sa défaveur car très rapidement, dès le 20 juin 1792, le roi sera injurié et ridiculisé dans sa propre demeure, le château des Tuileries.

Ce dernier épisode sera suivi en août de son arrestation, de la fin de la monarchie et de la fin de la Constitution de 1791.

On comptera plusieurs centaines de morts (plus de neuf cents), parmi les gardes suisses qui protégeaient le roi et sa famille, lors de la prise des Tuileries le 10 août 1792, par 2 600 « Fédérés » et les membres des sections révolutionnaires parisiennes.

Immédiatement après cette épreuve de force, c’est la Commune de Paris, à l’origine de cette émeute, qui dicte sa volonté. Tout ce qui s’est passé aux Tuileries pendant ce mois d’août est illégal, non conforme à la Constitution de 1791 et souvent en désaccord avec la plupart des députés de l’Assemblée Législative, mais face à la violence, les quelques députés présents (240 sur 745), capituleront devant les factieux parisiens.

L’Assemblée Législative sera immédiatement abandonnée au profit d’une nouvelle Assemblée élue en septembre 1792, nommée « Convention Nationale » en référence à la Convention américaine, qui aura le pouvoir de décider de l’avenir du roi et devra réaliser une nouvelle Constitution. La première République sera proclamée le 25 septembre 1792.

Un calendrier « révolutionnaire » sera mis en place à partir de cette République.

Les très nombreux massacres (plus de 2 600 rien qu’à Paris), imputés à la Commune de Paris, vont commencer en septembre 1792. Au début, les nobles et les ecclésiastiques tomberont par centaines. Ils seront suivis par des gens du peuple, des prisonniers et des députés.

Entre le 2 et le 6 septembre 1792, parmi les condamnés à la guillotine, on comptera plus d’une centaine d’aristocrates, 220 ecclésiastiques, 150 gardes suisses ou du palais, 800 condamnés de droit commun, qui purgeaient leur peine en prison et une cinquantaine de « suspects ».

Les députés de la Convention nationale et plus globalement les membres des clubs, vont aussi, dans les mois suivants, s’entretuer entre eux, avant de généraliser la « Terreur » dans tout le pays, à partir de septembre 1793. Celle-ci prendra fin après la chute de Robespierre le 26 juillet 1794.

À l’extérieur de la France, la Prusse, voyant la situation en France comme une opportunité, entrera en guerre le 3 juillet 1792 et rejoindra la première coalition avec l’Autriche-Hongrie.

 

3. Chronologie des événements

Le 20 avril 1792, la France déclare la guerre à l’empire d’Autriche-Hongrie.

Le 25 avril 1792, Claude Joseph Rouget, dit de Lisle, compose à Strasbourg un chant de guerre pour l’armée du Rhin, mais ce chant sera repris et chanté lors du siège du château des Tuileries le 10 août 1792, par les « sans-culottes » en provenance de Marseille. C’est pourquoi, ce chant a été appelé, par la suite, « Marseillaise ».

Le 13 juin 1792, Louis XVI renvoie les ministres « Girondins » Roland, Servan et Clavière. Le Général Charles François du Perrier du Mouriez, dit Dumouriez, ministre des Affaires étrangères depuis le 15 mars 1792, devient ministre de la Guerre. Celui-ci, futur vainqueur « déclaré » de la bataille de Valmy avec Kellermann, se retournera contre la France après la déclaration de la Première République.

Le 15 juin 1792, Dumouriez, devant les premiers résultats désastreux de l’Armée du Nord, démissionne. Il est remplacé par Pierre Auguste Lajard, un officier de l’Ancien Régime.

Le 20 juin 1792, profitant de l’absence de la Garde Nationale, une foule haineuse composée de plusieurs milliers de Parisiens et de « sans-culottes » envahit le château des Tuileries, réclamant le retour des ministres et le retrait du veto du roi aux derniers décrets. Louis XVI sera insulté, ridiculisé et coiffé contre sa volonté du célèbre bonnet phrygien.

Le 30 juin 1792, la tentative de coup d’État de La Fayette avorte. La Fayette, alors basé avec son armée au camp de Maubeuge, et constatant que les événements de Paris affaiblissent l’édifice constitutionnel construit depuis juin 1789, adresse une lettre le 16 juin 1792 à l’Assemblée Législative. Dans celle-ci, il dénonce avec énergie la faction jacobine responsable de tous les désordres dont souffre le pays.

Promoteur de la « Déclaration des droits de l’homme et du citoyen », La Fayette adjure l’Assemblée de rétablir l’égalité civile, la liberté religieuse, faire respecter le pouvoir royal et enfin de supprimer tous les pouvoirs que les clubs et les sociétés secrètes s’étaient auto-octroyés. Le contenu de cette lettre sera très mal reçu, par la majorité des députés, qui verront cela comme une tentative de coup d’État.

Le 2 juillet 1792, départ de Marseille pour Paris, du premier bataillon de volontaires marseillais qui va propager le succès du chant appelé maintenant « Marseillaise ».

Le 11 juillet 1792, l’Assemblée Législative proclame « la patrie en danger ».

Le 25 juillet 1792, sous l’influence de la reine Marie-Antoinette et du comte de Fersen, le duc de Brunswick commandant les armées coalisées d’Autriche-Hongrie et de Prusse, signe un manifeste à Coblence, dans lequel il menace les révolutionnaires de « livrer Paris à une exécution militaire et à une subversion totale si la famille royale recevait la moindre atteinte ».

Le contenu de ce document, vu comme une menace, aura l’effet inverse de celui escompté. Ce document va stimuler l’ardeur des « sans-culottes » qui préparaient méthodiquement depuis le 20 juin 1792, l’insurrection destinée à renverser le roi et la Constitution de 1791.

Le 9 août 1792, dans la soirée, à l’Hôtel de Ville de Paris, l’Assemblée de la Commune de Paris devient insurrectionnelle. Les lois et la Constitution de 1791 ne sont plus respectées. Paris sera livré à l’insurrection générale.

Le 10 août 1792, les « sans-culottes » s’emparent par la force du château des Tuileries et massacrent tous les gardes suisses, qui protégeaient le roi et sa famille. Le roi et sa famille se réfugient à l’Assemblée. Ils sont arrêtés. L’Assemblée Législative nomme un Conseil exécutif provisoire, remplaçant le Conseil du roi avec six ministres : Danton à la Justice, Roland à l’Intérieur, Servan à la Guerre, Clavière aux Finances, Lebrun aux Affaires Étrangères et Monge à la Marine.

Le 13 août 1792, la famille royale est incarcérée à la tour du Temple.

Le 17 août 1792, à la demande de Robespierre, institution du premier Tribunal révolutionnaire.

Le 19 août 1792, La Fayette s’exile en Autriche.

Le 23 août 1792, l’armée française dans Longwy capitule.

Le 24 août 1792, premières exécutions par l’usage de la « Guillotine » à Paris, Louis Collenot d’Angremont, chef des Brigades des Gardes Nationaux de Paris, et Arnaud de Laporte, ancien ministre de la Marine et du roi. Ces deux personnes seront arrêtées après la découverte de « l’Armoire de fer » (sorte de coffre-fort) dissimulée dans les appartements de Louis XVI, au château des Tuileries.

Une correspondance secrète et des livres de comptes occultes ont révélé les liens secrets entre le roi et différentes personnes comme le comte de Mirabeau, le général Santerre, La Fayette, Rivarol, Talleyrand, Dumouriez et bien d’autres. Certaines d’entre elles seront « exonérées » par Danton, ministre de la Justice, et d’autres non.

Le 26 août 1792, validation du décret d’exil des prêtres insermentés. 45 000 ecclésiastiques français s’exilent aux quatre coins de l’Europe et jusqu’en Amérique. Environ 30 000 vont entrer dans la clandestinité et 4 000 seront arrêtés et déportés aux bagnes.

Le 2 septembre 1792, l’armée française dans Verdun capitule.

Du 2 au 9 septembre 1792, plus de 2 600 personnes sont jugées par les Tribunaux révolutionnaires et exécutées dans la foulée. Toutes les prisons, entretenues par les sections de la Commune de Paris, seront vidées, envoyant les détenus à la guillotine. Idem pour tous les prêtres réfractaires, dans les abbayes ou monastères parisiens, et les gardes suisses ou Gardes du palais rescapés, de la journée du 10 août 1792.

Le 20 septembre 1792, la « bataille ! » de Valmy, ne fut ni une victoire ni une défaite. Dans les faits, les troupes coalisées étaient déjà occupées à se partager la Pologne avec la Russie, aussi chaque partie concernée (la Prusse et l’Autriche-Hongrie), avait décidé de retirer leurs armées face à la France, pour s’assurer un partage équitable des territoires polonais, face à la Russie.

À la « bataille » de Valmy, on compta « seulement » 300 morts côté français et 184 chez les Prussiens. Les Prussiens avaient quitté le champ de bataille avant le début des hostilités. La nouvelle Assemblée, la Convention nationale, après le marasme des défaites militaires successives, depuis la déclaration de guerre, avait besoin de faire remonter le moral révolutionnaire parisien. Aussi, elle déclara que cette « bataille » était une victoire pour la France.

Le 20 septembre 1792, ouverture de la Convention nationale, qui remplace l’Assemblée Législative. Les élections des députés de cette Convention nationale se sont déroulées dans des conditions ubuesques, donnant un résultat des votes représentant moins de 12 % du corps électoral et moins de 9 % de la population, avec une abstention record de 88 %. Cette nouvelle Assemblée est composée de 269 députés, appartenant aux anciennes Assemblées Constituante et Législative, sur un total de 749.

À Paris, c’est le Club des Jacobins qui désigne les députés qui représenteront Paris à la Convention nationale. Sur les 24 députés, on y trouve Maximilien de Robespierre, élu à la première place, suivi de Danton, Marat, David, Desmoulins, Dussaulx, Legendre, de Lavicomterie, Manuel, Panis, de Trouillet, Augustin de Robespierre, Sergent, Thomas, Vaugeois, Bourgain, Boursault-Malherbe, Billaud-Varenne, Collot d’Herbois, Desrue, Laignelot, Osselin, Robert, Beauvais de Préau en plus du duc d’Orléans, le cousin de Louis XVI, devenu Louis Philippe-Egalité, depuis septembre 1792.

Le 21 septembre 1792, la Convention nationale, à la légitimité douteuse, avec seulement les 300 nouveaux députés, déjà élus et présents, suite à une intervention de l’abbé Grégoire, décrète l’abolition de la monarchie et proclame la première République.

Là encore, contrairement aux idées diffusées par les Républiques suivantes, cette Révolution et donc, la proclamation de la première République, a été de fait imposée aux Français, par moins de 10 % de la population française.

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