La capitulation de Metz

1. Contexte au début du siège de Metz

Le 18 août 1870, après avoir été contraint de quitter progressivement la bataille engagée face aux armées prussiennes (première et 2e), sur les communes de Saint-Privat à Gravelotte, « l’armée de Metz » dut se retrancher derrière les forts de la ville.

Après avoir quitté le champ de bataille autour de Metz, le maréchal Bazaine et « l’armée de Metz » furent assiégés par 140 000 Prussiens. Il était, pour ces soldats français, quasiment impossible de quitter la place forte par manque de moyens, mais aussi par manque de motivation, surtout après l’annonce de la capitulation de Sedan, le 2 septembre 1870.

Le commandement, les officiers et les soldats français, déstabilisés, avaient beaucoup de mal à comprendre et justifier tous les sacrifices réalisés, pour voir s’écrouler en moins d’un mois la situation qui les avait amenés dans la citadelle de Metz. Le comble de cette situation fut atteint lorsque ceux-ci ont appris la proclamation de la 3e République, le 4 septembre 1870.

En effet, les armées françaises d’Alsace et de Metz étaient des armées « impériales » donc essentiellement composées d’un encadrement « bonapartiste » ou proche de l’Empire. Ces armées venaient déjà de subir la honte et le déshonneur d’être obligées de se battre contre un ennemi deux fois supérieur en nombre et surtout nettement mieux équipé.

L’Empire s’écroulait devant eux et le nouveau gouvernement du pays, pourtant responsable de cette guerre perdue d’avance, leur imposa brutalement la République. Dans ces conditions, les « républicains » post-Napoléon III ne purent comprendre et accepter la capitulation de cette armée non républicaine.

 

2. Les tentatives de Bazaine pour sauver la France et son armée

Le maréchal François Achille Bazaine était un soldat aguerri et compétent. Il avait participé, avant la guerre de 1870, à différentes campagnes militaires dans lesquelles, il avait maintes fois fait ses preuves d’officier et de bon stratège.

 

2.1 Biographie du maréchal Bazaine.

Il était le fils d’un général du Premier Empire, Pierre-Dominique Bazaine, polytechnicien. Il était aussi le frère cadet du général et ingénieur des Ponts et Chaussées, Pierre-Dominique Bazaine.

François Achille Bazaine ayant lui-même échoué en 1830 au concours d’entrée à l’École polytechnique, commença son intégration dans l’armée française, avec le grade de caporal.

Il progressa dans les grades successifs, au sein de la Légion étrangère, avec notamment le grade de sergent en juillet 1832, sergent-major en 1833 et blessé au combat en Algérie, il fut promu lieutenant le 22 juillet 1835.

Pendant la guerre d’Espagne, sous Louis-Philippe 1er, il participa avec le grade de capitaine à plusieurs batailles en 1835, 1836 et 1837.  Il fut affecté à nouveau en Algérie en 1839, où il participa aux batailles de Miliana, de Kabylie et du Maroc, en 1840. Promu au grade de chef de bataillon en 1844, il reçut la Légion d’honneur pour faits d’armes, après les combats de Sidi el Kafir en 1845.

Promu lieutenant-colonel en 1848, il fut nommé colonel en 1850. Alors à la tête du 1er régiment de la Légion étrangère de 1851 à 1854, il se maria le 12 juin 1852, avec Maria Juaria Grégorio Tormo de la Soledad, une jeune femme espagnole.

Il participa à la guerre de Crimée en 1855 et à la bataille de Solférino en Italie, du 8 au 24 juin 1859. Il fut promu maréchal de camp en octobre 1854.

Il commanda la 1ère division d’infanterie, du corps expéditionnaire, envoyée au Mexique par Napoléon III de 1862 à 1865, date à laquelle, il fut promu maréchal de France et Sénateur du Second Empire.

Après des relations tendues avec le jeune « empereur » Maximilien du Mexique, il fut rapatrié en France en 1867 et reçut le commandement du 3e corps d’armée à Nancy.

Au début de la guerre de 1870, il fut nommé commandant en chef de « l’armée de Metz » parfois appelée « armée du Rhin » par certains historiens.

 

2.2 Commandant en chef de l’armée de Metz.

Son choix, le 18 août 1870, pourtant partiellement imposé par les deux armées prussiennes autour de Metz, de se réfugier avec son armée dans les fortifications de la place forte, n’était pas stupide, comme certains historiens « républicains » l’ont laissé supposer.

En effet, ce choix permit de réduire sensiblement les pertes humaines au sein de son armée et obligea les Prussiens à laisser sur place plus de 140 000 hommes pour établir et maintenir le siège de Metz. Ce laps de temps gagné aurait pu être mis à profit par l’armée de Châlons, pour lui venir en aide et éventuellement préparer une autre armée pour la défense de Paris.

Hélas, cette armée d’Alsace, devenue l’armée de Châlons, avait effectué inutilement, sur les ordres de Napoléon III, une retraite sur 200 km, de l’Alsace jusqu’à Châlons-en-Champagne, pour finalement revenir trop tard, vers Metz. Cette erreur de stratégie entraîna la défaite de Sedan, puis la capitulation.

L’annonce de la capitulation de Sedan, par Napoléon III lui-même, fut ressentie comme un séisme par le maréchal Bazaine et toute son armée de Metz. Pourtant, malgré cela, Bazaine a continué à croire possible de sauver l’empire, en essayant de négocier avec la régente et impératrice Eugénie. Après tout, Napoléon III avait un héritier qui aurait pu monter sur le trône.

Le maréchal Bazaine aura essayé de sauver la France malgré elle. Évidemment, l’annonce en provenance de Paris, concernant la proclamation de la République, fut perçue à Metz, comme l’aboutissement final du désastre, commencé en juillet 1870, avec la déclaration de guerre, alors que tout le monde savait l’armée française très nettement inférieure en nombre et surtout mal équipée et mal préparée.

Dès le 4 septembre 1870, Bazaine, avec l’accord de son état-major, a essayé de négocier avec les Prussiens pour le laisser partir pour Paris, lui et son armée, afin de « sauver » la France de la poussée républicaine parisienne.

Le chancelier Otto von Bismarck, installé au château de Ferrières, dans la région parisienne, entretenait depuis la mi-septembre 1870, des négociations compliquées avec les représentants du gouvernement auto-déclaré de la défense nationale. Les discussions houleuses portaient sur les conditions d’un armistice, suite à la capitulation de Napoléon III.

Le chancelier Bismarck trouva une possible sortie de crise lorsque se présenta, le 20 septembre 1870, un homme d’affaires, muni d’un message pour Napoléon III, de la part de Louis-Napoléon, le prince impérial. Cet homme d’affaires était Edmond Régnier. Ce dernier fut envoyé à Metz, mandaté par Bismarck, rencontrer le maréchal Bazaine, dans l’espoir que celui-ci accepte de capituler, et lui décrire la situation qu’il aura constatée de l’intérieur de la ville assiégée.

Le maréchal Bazaine, suite à l’entrevue avec Edmond Régnier, qui avait essayé en vain de rencontrer l’impératrice Eugénie exilée à Hastings en Angleterre, envoya à Londres le général Bourbaki, ancien commandant de la garde impériale. La mission qui fut confiée à Bourbaki, avec l’accord des Prussiens, était de rencontrer l’impératrice et la convaincre de tout faire pour maintenir l’empire et ainsi invalider la proclamation de la République.

Le général Bourbaki, fils d’un colonel franco-grec, fut choisi par le maréchal Bazaine parce qu’il était le frère de madame Lebreton (Adélaïde Charlotte Joséphine Bourbaki), la lectrice de l’impératrice. Bourbaki, lorsqu’il arriva en Angleterre, le 27 septembre 1870, se rendra compte que l’impératrice ne l’attendait pas et qu’elle n’avait pas confié de mission à Edmond Régnier.

Malheureusement, alors que Napoléon III et l’armée de Châlons étaient captifs près de Cassel en Allemagne, l’impératrice, irresponsable et naïve, souhaitait la poursuite de la guerre alors que les deux armées françaises étaient vaincues.

 

3. Les événements à Paris et la capitulation de Metz.

3.1 Les actions du « gouvernement de défense nationale »

Après sa fuite de Paris en ballon, Léon Gambetta, passant par Amiens, finit par rejoindre Tours. Le 9 octobre 1870, avec une audace due aux événements, Léon Gambetta s’attribua, de fait et sans l’approbation de ses collègues du gouvernement, la charge de ministre de la Guerre. Seul, il décida de poursuivre la guerre en essayant naïvement de reconstruire des armées en province.

Il réussit, avec beaucoup de difficultés, à faire naître du néant quatre armées improvisées composées de plus de 600 000 hommes. Cependant, les seuls véritables militaires compétents et formés de ces armées provenaient d’un rappel d’Algérie de quelques troupes. Ces armées, plus encore que les armées d’Alsace et de Metz, malgré leur nombre, avaient peu de chances de vaincre les armées prussiennes nettement mieux équipées et bien formées.

 

3.2 La capitulation de Metz

Le siège de Metz par les Prussiens dura près de deux mois. Bazaine et ses troupes tentèrent plusieurs fois, en vain, des sorties en vue de rompre l’encerclement de la ville. Le manque de nourriture, d’eau et de soins finit par totalement démoraliser les troupes et les habitants de cette commune. Le maréchal Bazaine et son état-major s’étaient réfugiés dans le fort, sur les hauteurs du Ban-Saint-Martin.

Le moral général des troupes avait déjà été fortement ébranlé, suite aux mauvaises nouvelles consécutives de la capitulation de Sedan et de la promulgation de la République. Le froid et la faim continuent depuis deux mois, achevèrent les derniers espoirs. Chaque jour supplémentaire de siège augmentait sensiblement le rang des 15 000 malades ou blessés.

De fait, aucun espoir n’était à attendre de l’extérieur. Aussi, la mort dans l’âme, le maréchal Bazaine, après avoir consulté son état-major, finit par accepter le 27 octobre 1870, la reddition proposée par les Prussiens. Suite à cette reddition, plus de 120 000 soldats prussiens, bloqués depuis le début du siège, renforcèrent les autres  armées autour de Paris.

La signature de la capitulation de Metz fut réalisée le 28 octobre 1870, au château de Frescaty, dans la proche banlieue, en présence des plénipotentiaires prussiens.

Les Prussiens s’installèrent dans la ville de Metz et dans les environs, qu’ils ne quitteront, contraints et forcés, qu’en 1918.

 

 

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